LES CAUSES DE L’ARRIVEE DANS LA RUE
Certains enfants arrivent dans la rue à cause leur comportement parfois jugé bizzard, d’autres enfants sont également rejetés, de manière radicale, par leur famille. C’est le cas des enfants accusés de sorcellerie, une pratique de plus en plus répandue dans notre milieu. La violence du rejet familial modifie la façon dont ils s’insèrent dans la vie dans la rue. Le processus d’aller-retour entre la rue et la famille ne pouvant avoir lieu dans leur cas, le passage à la vie dans la rue est immédiat et radical.
Les enfants accusés de sorcellerie est la problématique autour de laquelle gravite notre action. Des enfants en situation difficile sont accusés de sorcellerie, des enfants issus des familles recomposées et orphelins.
L’histoire de tels enfants rend compte de l’évolution progressive d’une représentation malfaisante de l’enfant (liée à son origine incestueuse et à sa vulnérabilité) vers une représentation d’enfant dit sorcier. La plus part de ces enfants sont victimes d’un problème d’appartenance, de filiation, car il est issu d’une union non autorisée par la tradition, par exemple, par la pauvreté. L’enfant devient donc l’objet de la honte. Seule sa grand-mère semble avoir été bienveillante pour lui.
Ce phénomène d’accusation d’enfants sorciers met en évidence une profonde crise des représentations sociales en République du Congo. La société est passée d’une perception traditionnelle du phénomène sorcier (qui ne concernait que les adultes) à une perception « pseudo religieuse » alimentée par de nouveaux leadeurs religieux qui font des séances d’exorcisme un véritable fonds de commerce. L’accusation de sorcellerie devient un prétexte pour discréditer et se séparer d’une personne jugée indésirable.
Dans les contextes de confits armés et de sortie de crises, le phénomène des enfants des rues peut être étroitement lié à celui à la problématique des enfants soldats. Les enfants vivant dans la rue sont facilement accessibles pour être enrôlés en tant que jeunes soldats. De même, à l’issue des confits, les enfants soldats peuvent n’avoir d’autre choix que celui de la vie dans la rue compte tenu de leur parcours, de ce qu’ils ont vécu, subi ou fait. L’enrôlement d’enfants et d’adolescents dans les confits armés est une raison supplémentaire qui peut les conduire à vivre dans la rue.
Comprendre qui sont les enfants des rues et les raisons qui poussent des enfants à vivre dans la rue et à s’y maintenir invite à s’interroger sur la façon dont les enfants et jeunes des rues vivent dans l’espace urbain. La rue constitue le lieu d’origine de leurs ressources de vie, qu’elles soient économiques, humaines ou parfois ludiques, les ressources économiques. Certains enfants, notamment les « enfants dans la rue », peuvent être scolarisés le matin et mendier ou travailler dans les rues le reste de la journée avant de rentrer dans leur famille la nuit venue. D’autres, ceux dits « enfants de la rue », doivent y trouver tous leurs moyens de subsistance. Les plus jeunes et les nouveaux arrivants vivent essentiellement de la mendicité, un moyen lucratif commun aux enfants des rues à travers le monde. Apanage des plus jeunes qui suscitent davantage la compassion des riverains et des passants que les plus âgés, la mendicité est souvent exploitée par ces « grands » de la rue en échange d’une forme de protection sécuritaire.
Les activités rémunératrices évoluent en fonction de l’âge mais aussi de la durée de vie dans la rue. Les enfants passent d’une activité à une autre en fonction de leur capacité à se mouvoir dans la ville, à être un leader de groupe et par conséquent à diriger les nouveaux venus.
Nous continuerons la semaine prochaine avec le thème des enfants de la rue, comment vivent-ils dans la rue.